Des religions qui se ressemblent toutes
Un énième titre fait la une : encore un attentat perpétré par un extrémiste au nom de Dieu – alors on soupire de lassitude. Et puis, quelque temps après, un leader religieux fait une déclaration qui vise à rétablir la paix dans une situation de conflit -alors on soupire de soulagement ou d’admiration.
« Ces religions, toutes les mêmes ! » De l’extérieur, on pourrait effectivement penser qu’elles tendent toutes vers un même but : la recherche et la promotion de l’amour, de la paix et des bonnes actions. Mais d’autres leur reprocheront d’avoir toutes le même effet : au mieux conflits et intolérance, au pire extrémisme et violence. Si certaines situations dans le monde nous incitent à l’optimisme – comme l’apaisement du conflit en Irlande du Nord depuis la fin des années 90 –, d’autres ne contribuent pas à donner une « bonne image » des religions, car celles-ci sont loin de combler les attentes de paix et d’amour. Elles sont souvent impliquées dans les conflits ethniques, qu’il s’agisse de bouddhistes et de musulmans dans le cas de l’épuration ethnique des Rohingyas en Birmanie, ou de chrétiens, d’ animistes et de musulmans en République centrafricaine, entre autres.
Enfin, point n’est besoin de se creuser la tête pour leur trouver des points communs : un dieu, un livre saint, des rites et des lieux de culte, des fidèles.
Bref, s’il n’y a guère de différences entre les religions, il semblerait qu’elles se valent toutes. Dans ces conditions, qu’est-ce que la foi chrétienne pourrait bien avoir de plus ?
Des différences profondes
On ne peut se contenter de cette approche superficielle. En effet, l’idée que toutes les religions se valent repose sur la méconnaissance de tout ce qui, en elles, est non seulement différent mais aussi incompatible. Regardons de plus près ce qui les caractérise : monothéisme ou polythéisme ? un Dieu distant ou un Dieu qui s’implique dans l’histoire humaine? un Dieu identifié avec la nature (et donc immanent, dans ce qu’on appelle le panthéisme) ou distinct de la nature (transcendant) ? Jésus-Christ vu comme un simple homme, ou comme Dieu fait homme ?
On ne peut réduire ces différences en avançant l’argument d’une humanité variée, avec des religions qui s’adapteraient à la culture et à l’histoire de chacun (à chacun sa vérité !). En effet, elles concernent la nature même de Dieu et une conception polythéiste ne peut s’accorder avec une conception monothéiste, de même qu’ une conception panthéiste s’oppose radicalement à l’idée de la transcendance de Dieu, etc.
Enfin, si chaque religion proclame que sa vérité est LA vérité, alors elles s’excluent mutuellement.
La mise en évidence de toutes ces différences montre que les religions ne peuvent se valoir, puisque leurs fondements s’opposent. Il ne s’agit donc plus de voir en quoi elles se ressemblent (en bien ou en mal), mais de repérer ce qui fait la spécificité de telle ou telle. Or, à y regarder de plus près, la foi chrétienne fait vraiment exception !
Trois spécificités de la foi chrétienne
La foi chrétienne est la seule à avoir un Dieu parfaitement Dieu - créateur, parfaitement saint, grand, tout-puissant, hors du temps - , mais qui s’incarne, qui devient homme. Et pourquoi ? Pour aller à la rencontre des hommes afin d’avoir une relation avec eux. Il choisit de prendre notre condition : il se soumet au temps, à la faim, à la fatigue, il connaît nos joies, nos peines. Bref, il met les mains dans le cambouis et s’incarne en partageant la faiblesse de l’être humain ; il va même jusqu’à mourir, comme lui. Est-ce que cela lui fait perdre en « divinité » ? Non ! Il reste Dieu à 100%, tout en étant homme à 100% (on n’est même pas à 50-50 !). La foi chrétienne appelle cela « le mystère de l’Incarnation »…
Et c'est du jamais vu dans les autres religions. Selon certaines, comme l’islam, Dieu ne peut pas se faire homme et Jésus n’est qu’un homme. Selon d’autres, un homme peut être l’incarnation d’une divinité. L’hindouisme a, par exemple, des incarnations de divinités, les avatars ; mais ces incarnations sont extrêmement limitées. Ce ne sont que des apparences (les dieux ne font que revêtir la peau d’un homme), qui sont temporaires (à la fin de leur mission, elles retournent à leur état antérieur), récurrentes (il y en a eu plusieurs). Et surtout, elles ne sont que partielles : ces divinités ne sont pas pleinement humaines, à l’inverse de Jésus-Christ, seul Dieu fait véritablement homme et dont le retour en chair et en os est attendu par les chrétiens.
En somme, selon la foi chrétienne, Dieu a fait irruption dans l’histoire humaine, et cela a laissé des traces : les Evangiles, qui sont des biographies de Jésus écrites d’après le témoignage des gens de l’époque, et … un calendrier : ne nous repérons-nous pas dans l’histoire à partir d’un « avant » et d’un « après » Jésus-Christ ?
Il est une autre spécificité de la foi chrétienne : ce qu’on appelle le « salut par grâce ». Toutes les religions constatent que l’humanité a un problème, à savoir : le mal existe et l’homme commet de mauvaises actions. Il doit essayer d’en limiter les conséquences et accomplir de bonnes actions pour gagner le paradis. C’est logique, en somme, car on répare le mal que l’on fait : on se prive de nourriture, on aide les pauvres, on respecte la nature, on médite pour maîtriser ses désirs ... Sauf que la foi chrétienne ne fonctionne pas du tout comme cela. Au contraire, elle part même du constat que l’homme ne peut se sauver lui-même et que face à un Dieu qui est totalement parfait, l’homme ne fait pas le poids et serait bien prétentieux de penser que ses bonnes œuvres pourraient le sauver. Alors, comment échapper aux conséquences de ses fautes et accéder au paradis ? Pour la foi chrétienne, le problème n’est pas « les » fautes, mais « la » faute : l’état de notre cœur plutôt qu’une to-do-list qu’on a du mal à respecter. Et notre être, naturellement incapable de répondre aux exigences de Dieu, mérite une sanction : la mort, qui est la séparation d’avec Dieu. C'est Jésus-Christ, Dieu fait homme, qui subit cette sanction à notre place en mourant sur la croix ; la punition est retombée sur lui, mais nous, nous sommes blanchis, pardonnés, et acceptés de nouveau par Dieu. Autrement dit, par la mort de son fils Jésus-Christ, Dieu règle lui-même le problème en prenant sur lui la sanction que nous méritions. Au premier siècle, l’apôtre Paul, un des fondateurs du christianisme, écrivait déjà que cette spécificité était une bizarrerie : « Nous, nous prêchons un Christ mis en croix. Les Juifs crient au scandale. Les Grecs, à l'absurdité. » (Première lettre de Paul au Corinthiens, chapitre 1, verset 23) Mais c'est la base de la foi chrétienne. Et elle permet d’être sûr de son « salut », puisqu’il dépend de la mort de Jésus à la croix (qui a déjà eu lieu) … et non d’un calcul de nos propres œuvres pour savoir s’il y en eu assez pour contrebalancer nos mauvaises actions !
Du coup … la foi chrétienne permet-elle de pécher impunément ? Non, car voici une autre de ses spécificités : les œuvres bonnes sont la conséquence du pardon que Dieu nous accorde, et non pas l’inverse. En effet, Dieu ne se contente pas de nous pardonner gratuitement : il vient vivre en nous, par le « Saint-Esprit », pour nous transformer de l’intérieur et nous rendre capables de lui obéir. Notre comportement n’est plus le fruit d’efforts imposés de l’extérieur, mais d’une transformation intérieure qui nous donne envie de plaire à Dieu. Vous ne verrez pas d’autre religion qui déclare que son Dieu vient habiter dans le cœur des croyants. Vous entendrez peut-être dire qu’on a tous en nous une étincelle de divin à découvrir ou à mettre en œuvre (dans le panthéisme), ou qu’il faut atteindre un certain stade de spiritualité pour être «illuminé » (dans le bouddhisme). Mais la promesse du Dieu du christianisme est de venir habiter en chacun des croyants : « Demeurez en moi, et moi je demeurerai en vous », promet Jésus-Christ (Évangile de Jean ch. 15 v.4)
Ce que propose la foi chrétienne
Le Dieu du christianisme est unique en son genre, mais il transcende les cultures. Dans le christianisme, il n’est nécessaire ni d’adopter une autre culture, ni d’apprendre une nouvelle langue, ni d’adapter son régime alimentaire ou de suivre des règles qui nous sont étrangères. Devenir chrétien est à la portée de tout être humain qui reconnaît son besoin de Dieu. Car ce que la foi chrétienne propose n’est pas un chemin pour atteindre la joie, la paix ou l’amour, mais une réconciliation et une relation avec Dieu, à son initiative. Il ne s’agit donc pas d’efforts à faire pour approcher Dieu, mais d’un Dieu qui s’approche lui-même de l’homme – et lui offre gratuitement le pardon des péchés en Jésus-Christ, en même temps qu’un amour inconditionnel, ainsi qu’ une paix et une joie profondes qui ne dépendent ni de nos efforts, ni des circonstances de notre vie.
Alors … on tente ?